Nous voici partis de Bacalar en direction de notre premier passage de frontière. Les derniers kilomètres au Mexique sont bien différents des 450km déjà parcourus : il y a des virages et un (léger) dénivelé. Cela donne du relief à notre effort de pédalage et c’est agréable. Nous roulons gaiement les 30km qui nous séparent de la frontière en profitant bien du bas côté dont nous disposons : un espace à nous, un vrai luxe.

Il y a deux postes frontières, un pour les voitures et un pour les piétons, en vélo nous sommes considérés comme des piétons et traversons le tout petit village juxtaposé à la rivière que se partagent les deux pays.

Un passage de frontière coûteux

Nous profitons des pesos qu’il nous reste pour un dernier déjeuner au Mexique : quelques empañadas et des yaourts à boire et nous filons vers le poste de contrôle mexicain.

Les empanadas Mexicains, leur crêpes locales fourrées et frites
Les empanadas Mexicains, leur crêpes locales fourrées et frites

La mexicaine qui nous reçoit exige 25$ par personne au titre de la taxe de sortie. Par chance nous avons exactement 100$ sur nous et nous lui donnons pour recevoir nos coups de tampon.

Nous enfourchons nos vélos à vitesse réduite pour traverser le pont qui enjambe la rivière et nous fait pénétrer dans la « zone libre » où se trouve quelques boutiques et un hôtel/casino au milieu d’un désert de béton pourri.

Traversée du "no mans land" entre le Mexique et le Belize
Traversée du no mans land entre le Mexique et le Belize

Pour les Européens que nous sommes, cet endroit a une saveur étrange. Alors que nos passages de frontières sont presque invisibles, ici c’est plutôt « chacun chez soi ».

L’accueil est amical, nous passons assez rapidement les contrôles. Juste derrière nous, un bus de Beliziens, partis acheter des produits de première nécessité (papier toilette, lessive et savon) a débarqué, il nous faut remonter la file pour aller chercher nos vélos et ainsi repasser à travers cette foule pour passer la frontière, nous aurions pu y voir une allée d’honneur. En tout cas la frontière se passe sans encombre et nous sommes ravis de s’élancer sur de nouvelles routes.

Premiers coups de pédale  en territoire Bélizéen.
Premiers coups de pédale en territoire Bélizéen.

Un changement radical

Immédiatement après avoir passé la frontière nous comprenons que nous ne sommes plus au Mexique.

Premièrement, Belize est le seul pays d’Amérique Latine à parler Anglais, ce qui est appréciable vu notre niveau d’espagnol actuel.

Ensuite, il n’y a plus de Jungle ! Celle-ci a été brulée, rasée et est exploitée pour la culture de la canne à sucre.

Les populations noire, hispanique et blanche forment un mélange plus qu’original et les mélodies que nous saisissons lorsque les voitures nous dépassent sont maintenant créoles.

Enfin la route : fini les lignes droites interminables, on imagine que le tracé était bien plus contraint que dans le Yucatan par la dispersion de la population sur le territoire. Mais la différence qui nous affecte le plus est la qualité de la route : mauvaise, sans marquage au sol ni accotement. On s’imagine sur une départementale mal entretenue. Et bien ici, c’est l’autoroute !

Ceci est une autoroute.
Ceci est une autoroute.

Notre objectif du jour est d’atteindre Corozal, située sur la baie du même nom. C’est la ville la plus proche de la frontière. Nous visons l’hôtel Las Palmas repéré la veille, situé en plein centre. L’aperçu que nous avons de Corozal ne nous enchante guère, on pourrait croire que la ville sort d’un conflit, les rues sont défoncées, certaines maisons et bâtiments sont abandonnés et les plus vétustes menaces de tomber. Cependant l’ambiance est paisible.

Dans la rue de Corozal
Dans une rue de Corozal

Après avoir pris possession de notre chambre et fait quelques courses, nous emmenons les filles dans un parc nous laissant ainsi le temps porter des regards interrogatifs sur ce pays qui semble pauvre mais où tout est hors de prix ! Une chambre (moyenne) d’hôtel coûte facilement 75$ (sans petit déjeuner) et difficile de manger à 4 pour moins de 25$.

Le centre ville de Corozal
Le centre ville de Corozal

Nous avons préparé notre itinéraire pour nous rendre à la ville la plus proche Orange Walk. La carte nous donne une route qui nous permet d’éviter l’autoroute sur 10 km, nous optons pour cette option.

Au moment de bifurquer sur la route envisagée, un homme nous fait signe que l’autoroute c’est de l’autre côté. Nous lui faisons un signe de la tête pour le remercier et lui disons que nous optons pour une route avec moins de traffic. Quelques mètres plus loin rebelote… puis à l’arrivée dans le petit village Libertad, c’est un pick-up qui nous arrête et on nous dit que ce n’est vraiment pas une bonne idée de passer par là car on ne sait pas ce qu’il s’y passe, c’est une zone non contrôlée et que les gens mal intentionnés l’emprunte pour justement (eux aussi) éviter l’autoroute. Ok, message reçu, nous faisons demi-tour.

Plus tard, alors que nous faisons halte dans un shop pour faire le plein de calories, un cycliste s’arrête à nos cotés. C’est Jessy, un mexicain parti le matin même du Mexique et qui se rend à Belize City. Celui-ci nous met en garde envers les « noirs » de Belize. « Ne faites confiance à personne ici !« . Cela nous suffira à décliner sa proposition de nous accompagner sur la route :)

Une fois sur l’autoroute nous comprenons que les autres routes ne doivent pas être très praticables. Quant au traffic, les Beliziens ont très peu de voitures, on croise plutôt des camions de canne à sucre, des bus et des pick-up. La densité du traffic reste très raisonnable.

Néanmoins nous avons le vent de face, les camions nous laissent de la place lorsqu’ils nous dépassent mais l’appel d’air qu’ils créent n’est vraiment pas de tout repos compte tenu du chargement de nos montures.

C’est sous une chaleur écrasante et après bien des efforts que nous arrivons à Orange Walk. Nous tournons trop tôt sur une rue, un homme nous interpelle car il comprend très vite que nous sommes sur le mauvais chemin. Il nous indique la zone des hotels. Nous nous arrêtons à 12h à l’hotel De la Fuente, forts contents d’être arrivés !

Alors que Charlotte nous enregistre à l’accueil, un pickup s’arrête à ma hauteur. Un type âgé, engage la discussion. Il veut savoir d’où nous venons, où nous allons et fait part avec enthousiasme de son admiration. En lui expliquant notre route en détail, celui-ci nous recommande la plus grande vigilance. Mes tentatives d’en savoir plus sur ce à quoi il faut faire attention resteront vaines. Il faut faire attention mais il ne sait pas à quoi :-)

Nous préparons la journée du lendemain et les jours à venir. Les prix sont exorbitants, nous comptons traverser le pays le plus vite possible. Les distances entre deux points restent grandes, il commence à y avoir du dénivelé et compte tenu de l’état des routes, il nous faudra 5 jours pour rejoindre le Guatemala. Mais l’idée de passer 5 longues journées dans les mêmes conditions ne nous tente plus. On souhaite prendre du plaisir, voir de belles choses et surtout rester dans une zone plutôt sûre. Les rencontres et mises en garde reçues à quelques heures d’intervalles n’installent pas le meilleur état d’esprit alors même que nous ne nous sommes jamais senti en danger.

Nous trouvons rapidement en fouillant sur le web, un bus qui peut nous prendre avec toutes nos affaires devant l’hôtel dès le lendemain matin et nous amener jusqu’au Guatemala pour 60$US. Nous annonçons bien que nous avons 2 vélos, une carriole et 3 sacs (sacs de l’aéroport que nous avons conservé pour y regrouper les sacoches – ils servent aussi de « sièges » en camping). Notre correspondante nous confirme que c’est bon. Nous faisons une vérification avec le réceptionniste de l’hôtel car le prix nous parait anormalement bas. Il passe plusieurs coups de fils au Mexique et à Belize et nous confirme qu’ils ont bien compris qu’il y avait des vélos et qu’ils seraient là le lendemain à 11h.

Nous sommes soulagés, nous serons donc le lendemain soir au Guatemala et avons plus qu’à passer un bon après-midi.

Nous sortons visiter le centre ville d’Orange Walk.

Un passage par la boulangerie pour le goûter
Un passage par la boulangerie pour le goûter

Nous sommes accostés par différentes personnes qui souhaitent nous parler de leur pays et nous donner les bons plans. Les échanges sont très sympathiques (et l’anglais aide beaucoup) et nous sentons qu’ils aiment les touristes qui viennent à eux.

Le "City hall" d'Orange Walk tow
Le City hall d’Orange Walk town

Quand plus rien ne semble possible

Le mercredi matin, nous emballons toutes nos affaires que nous transférons à l’avant de l’hôtel. Il fait très chaud mais surtout le taux d’humidité est à son maximum. La lourdeur de l’air est palpable à chacun de nos mouvements.

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11h arrive et le bus aussi. Le bus ne s’est pas encore arrêté que nous voyons les yeux du chauffeur s’écarquiller. Il descend et nous informe qu’il ne peut pas nous prendre, nous sommes trop chargés. Après un appel à son agence et des négociations infructueuses nous restons sur le carreau, rincés. Les filles comprennent qu’il y a un problème et disent  : « Mais on peut pas rester là, on doit aller au Guatemala…« 

Toute l’équipe de l’hôtel sort et le patron demande à son équipe de résoudre le problème pour nous. Après quelques coups de fils l’agence s’engage à ce que demain le bus soit moins plein afin qu’il y ait de la place pour nos affaires. Nous ne pourrons pas assez remercier l’hôtel pour leur aide sur ce coup là.

Nous attendons donc demain, 11h et le bus qui (on espère) nous embarquera vers de nouvelles aventures.

Belize, pays dont nous rêvons depuis des années, nous te quittons mais reviendrons pour te découvrir autrement.

10 commentaires

  • Coucou, super votre journal et vos photos. On vous lit souvent et on espère que les galéres vont vous motiver encore plus… Bonne route vers le Guatemala, grosses bises à vous quatre.

  • Bonjour,

    je suis Stéphane je travaille chez Thule (en France); je viens de lire le récit de votre aventure et je vois que vous avez rencontrez un soucis technique avec votre remorque à vélo Thule.
    J’ai contacté mon collègue responsable du marché d’Amérique du Sud, pour essayer de vous trouver une solution.
    Pour pouvoir aller plus loin dans nos démarches, nous avons besoin de vos localiser ; êtes-vous au Guatemala et si oui dans quelle ville et pour combien de temps?
    A+
    Stéphane

    • Bonjour Stéphane, je suis Victor, Lilian et Charlotte sont aux dernières nouvelles sur la CA13, route au Guatemala. Ils devraient avoir internet d’ici quelques jours, merci pour votre message. Je vous fait un mail commun.

  • ………… ce soir, j’ai voyagé……………. Merci !
    Ouahou…. Votre aventure sent bon la joie et la force de vivre, la soif de l’inattendu et des découvertes. On vous suit… De loin… Notre première année dans le lyonnais a filé à toute allure. On commence tout juste à prendre le rythme de notre vie ici… et vous êtes partis !je m’en veux d’avoir manqué vos appels, mails avant le départ.. On vous accueillera à votre retour pour faire le plein de vos aventures… Belle route à vous !

  • Hey salut les cyclos!! J’étais dans le jus jusqu’ici, pas moyen de me poser et de suivre votre voyage…je vois qu’il s’en est passé des choses depuis notre rencontre à marseille!
    Bon vous l’avez eu ce bus qui vous a laissé en rade? Et cette remorque elle tient?
    J’ai vu qu’un pote vous avez conseillé de voir avec Thule, ils doivent sûrement avoir un service après-vente et même des référents sur place dans les grosses villes…
    Avec un peu de chance, les filles sont grandir tellement avec ce voyage qu’elles vont finir sur un vélo elles aussi et finis les problèmes de carriole qui ne servira plus que de coffre!

    Sympa votre journal en tous cas, vous êtes au tout début. J’ai hâte de lire vos prochaines étapes et de voir votre écriture changer peu à peu…
    Prenez soin de vous. On vous aime!

  • Ah bé ça alors, je viens de découvrir que vous êtiez partis pour un bien long périple en famille… c’est super, vous allez vivre une année très riche de rencontres, découvertes des autres … et de vous bien sûr; et tout ça restera gravé dans vos têtes et la mémoire de vos filles, comme notre aventure bateau d’il y a 35 ans..!
    Alors, les Rebuffat vous suivent au jour le jour, plein de courage pour tous vos coups de pédales, et plein de bonheurs! On a un neveu qui part sacs à dos avec sa femme et ses deux enfants(4 et 6 ans) mais que 3 mois, eux, un peu là où vous serez sans doute aussi. Je vous dirai!
    Bises

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