Dimanche matin de bonne heure et de bonne humeur

Dimanche 15 mai 2016 – Les parents ouvrent les yeux sans réveil vers 7h30, à la fraiche. Il fait à peine 10°C et le petit vent n’arrange rien. Liv et Tess sortent le bout de leur nez une heure plus tard avec le soleil. Elles atterrissent avec leur tapis de sol et leur duvet autour du petit déjeuner. Finis les pancakes et l’avoine à l’eau. Elles se régalent avec des céréales au chocolat et du lait : une composition matinale normale pour la plupart des français mais un vrai luxe pour nous. Les parents eux ont la chance de savourer un café fraichement passé dans la cafetière italienne petit gabarit que nous avons embarquée.

Coincés dans le carré de soleil que le ciel nous accorde nous emballons toutes nos affaires et nous mettons en route pour une étape qui devrait nous amener jusqu’à Concarneau. Nous sortons du camping avec le sourire collé au visage. Il fait beau, presque bon, nous roulons en bord de mer au milieu de sportifs du dimanche sortis faire leur jogging. Nous sommes bien reposés après notre journée de repos de la veille et encore plus heureux d’être en selle.

Ma cheville va beaucoup mieux, je prends donc la tête du convoi avec la carriole. La propriétaire du camping m’a donné une carte touristique du coin en m’indiquant comment éviter le bourg de Guidel et son marché du dimanche matin. La carte sous le yeux je suis totalement en charge de l’itinéraire pendant 5 km ! Je ne suis pas l’itinéraire conseillé mais coupe à gauche dans le premier lotissement… selon la carte c’est plus court. Malgré le manque de précision de mon document, je demande à Lilian de me faire pleinement confiance. Il rigole derrière et je devine ses mots : « Donnez une carte à une femme et c’est l’aventure assurée ». Bon, il est vrai qu’il n’a pas tout à fait tord. Je vais au plus court et nous finissons dans un sous bois sur de la terre et des cailloux. C’est pas tout à fait plat et je commence à sentir que le petit déjeuner n’est pas assez descendu. Après une dernière montée qui finit ce petit passage forestier en beauté nous sommes à nouveau sur la route.

A travers bois.
A travers bois.

Dans la descente une femme court dans le même sens que nous, sur la route, elle a un mini sac à dos avec une popotte. Ce n’est pas une joggeuse du dimanche, c’est certain. Nous nous arrêtons un peu plus loin et elle nous rattrape. Elle est partie il y a 15 jours pour faire le tour de France en courant. Elle compte faire 3200 km en 57 étapes… nous calculons rapidement, cela fait 56 km par jour en moyenne. C’est à peine moins de ce que nous faisons en vélo en Bretagne. Elle nous épate !

Nous croisons (ou nous faisons dépasser par) un grand nombre de cyclistes, oui c’est dimanche ! Nous lançons des « Bonjour » à la pelle et restons toujours surpris de constater combien un bon nombre de nos salutations restent sans réponse. Quand un cycliste nous passe, se retourne et nous lance avec un grand sourire « Bonjour », je le remercie pour son geste et sa bonne humeur. Si nous avons eu des signes d’encouragement quasiment à toutes les voitures qui nous dépassaient en Amérique Centrale, ici après une petite semaine sur les routes, nous pouvons compter sur les doigts de la main les « likes » collectés sur le bord des routes. Quant aux coups de klaxons, pour le moment ils ressemblent plus à des réprimandes car nous ne sommes pas sur la piste de cyclable (que nous ne pouvons pas prendre ou dont l’entrée nous a échappée).

Toujours de bonne humeur nous faisons une première halte près d’une église et de son lavoir historique. Au moment de partir nous constatons qu’une des roues de la carriole est dégonflée. Arrêt mécanique. Impossible de trouver le trou dans la chambre à air malgré son passage dans l’eau du lavoir. On regonfle et on repart… on verra bien.

Pause déjeuner.
Pause déjeuner.

Pause déjeuner 10 km plus loin à notre endroit préféré : le banc publique à côté de l’église elle même en face de la boulangerie pour tester une fois de plus le Kouign Amann. La roue de la carriole tiens toujours, on roule. Nous ne sommes qu’à quelques kilomètres de Pont Aven. Lilian reprend la tête du peloton. Nous arrivons vite et nous roulons tout doucement à travers les ruelles bien chargées. Je jette un coup d’oeil aux roues de la carriole assez régulièrement et je dis à Lilian que la roue droite à l’aire d’avoir un problème, qu’à gauche cela ne tourne pas rond et que la roue, une fois de plus (mais plus que jamais) touche le bas de caisse. Nous nous arrêtons dans le parc public où Liv et Tess courent tout de suite vers les jeux pour se dégourdir les pates et se faire de nouveaux copains.

Le constat est immédiat : l’axe de la roue gauche est complètement tordu et la roue droite a une grosseur au niveau de la valve. Pour la roue droite, un simple démontage/remontage de pneu et c’est ok. Pour la roue gauche c’est moins évident. Lilian tente de rétablir l’axe mais la pièce bien fragilisée se casse rapidement. La carriole est sur le côté, toute la trousse à outil est étalée sur la pelouse toute propre. Pont Aven un dimanche après-midi est pris d’assaut par les touristes-retraités et les familles bon-chic-bon-genre qui osent à peine jeter un oeil vers nous. Malgré le fait d’être dans notre pays, où nous n’avons pas de barrière de la langue nous ne nous sentons pas à notre place. Nous sommes des bêtes étranges. Un papy s’approche de nous et lâche : « Ah bah là c’est vraiment embêtant, c’est bien cassé… » Merci ! on ne l’avait pas remarqué.

Cette fois-ci c'est arrêt forcé !
Cette fois-ci c’est arrêt forcé !

Dans un premier temps nous sommes déstabilisés, les plans de la journée doivent être revus, nous ne serons pas à Concarneau ce soir. On risque d’être bloqué quelques jours… Faut-il aller chercher le van pour être en mesure de nous déplacer et trouver une pièce de remplacement plus facilement ? Tout se mélange mais il est 16h30 et nous devons avant tout trouver un endroit où dormir ce soir et cette pelouse si soyeuse n’est pas une option… Nous postons quelques appels à l’aide sur facebook au cas où quelqu’un aurait un carré de pelouse dans un rayon de 5 kilomètres…

Nous décidons d’essayer de rouler tout doucement jusqu’au prochain camping qui est à 5 km. Nous franchissons à peine la sortie du parc que la roue est complètement sortie de son logement. Changement de tactique. Les filles passent sur nos portes-bagages et nous poussons nos montures pour sortir de la ville. Les passants nous regardent en souriant et en faisant part de leur reconnaissance. C’est gentil mais nous n’avons plus le sourire. Une fois sortis de la ville nous trouvons un bas côté couvert d’herbe.  Nous décidons de monter sur les vélos et d’avancer sur ce tapis vert à petite allure. Ce sera toujours moins fatiguant que de pousser. Lilian a Liv sur son porte bagage et la carriole attelée à sa roue arrière. Je vois combien il peine, la roue gauche est complètement rentrée dans le plastique et joue le rôle d’ancre dans l’herbe. Tout l’ensemble couine et Tess derrière moi me glisse : « On dirait que la carriole elle veut parler ! »

Difficile de pousser le convoi quand une des roues frotte.
Difficile de pousser le convoi quand une des roues frotte.

Quand le bas côté n’est pas assez large nous remettons pied à terre et poussons à nouveau. J’aimerai aider Lilian en poussant un peu la carriole mais ma cheville est encore trop fragile et le terrain n’est pas des plus favorables. Je dois donc le laisser tirer la charge tout seul. « J’ai l’impression de monter un col hors catégorie» dit-il. Le panneau du camping attendu est maintenant à portée de vue. Plus que quelques mètres. Le lieu est appelé camping a une superbe piscine et un complexe sportif digne d’une petite ville mais il n’y a pas d’emplacement pour les tentes. C’est une résidence de mobilhome qui contient 700 bungalows à la vente. Impossible d’en avoir un même pour une nuit. Le camping suivant est à 4 ou 5 km plus au sud…

Nous arrivons finalement au Camping Fleuri de Névez, un comme on les aime. Les emplacements sont arborés, verdoyants, au calme et sans visibilité sur les mobilhomes. Nous  avons que l’embarras du choix pour l’emplacement. Seules quelques caravanes sont installées près des sanitaires. Nous y serons bien le temps que nous trouvions une solution pour cette roue.

Les messages postés sur facebook ont porté leur fruits, nous avons des contacts un peu partout pour nous donner un coup de main si nécessaire. C’est très réconfortant mais pour le moment nous ne sommes pas surs de la nature de l’aide dont nous avons besoin.

Maintenant que nous sommes installés au camping nous ne pensons qu’à une seule chose : trouver une solution rapide pour repartir. Il nous semble que le plus simple et efficace soit de commander deux nouvelles roues sur internet en livraison express. Nous passons commande dès le soir sur un site Hollandais qui semble être le seul à proposer la roue dont nous avons besoin. Week-end de Pentecôte oblige nous n’avons pas de retour avant le mardi. Ils ne sont pas certains de l’avoir en stock… nous contactons directement Thule qui nous dit nous en envoyer une en express directement au camping. Après différents échanges téléphonique avec les Hollandais ils nous annoncent mercredi qu’ils n’ont pas de stock et qu’ils annulent notre commande. Thule ne donne plus signe de vie depuis la veille et nous attendons le numéro de suivi de la roue… Bref, mercredi nous commençons à trouver le temps long. Nous sommes à l’arrêt depuis 3 jours dans le froid et la pluie, nous avons besoin de bouger. Nous décidons que le lendemain nous trouverons une solution pour réparer nous même la roue.

La roue gauche est arrivée à bout !
La roue gauche est arrivée à bout !

Jeudi matin alors que Lilian s’apprête à partir au magasin de bricolage du coin, Thule nous informe que la roue sera là vendredi. Lilian part quand même chercher de quoi faire un montage de fortune. C’est décidé, nous partirons vendredi quoi qu’il arrive ! 

A l’arrêt mais pas sans activités

Ces quelques jours à pied nous offrent le temps de faire tout un tas d’activités en famille : parcours de bille, yoga, scoubidou, compositions végétales, ateliers dessins et écriture, lecture, jeux collectifs ou individuels… cela permet à tous de profiter du temps que nous avons. Nous jouons aussi à la recherche de réseau GSM et de 3G en nous déplaçant sur le terrain car oui nous sommes bien en 2016 mais en Bretagne, dans un coin qui a une couverture des plus aléatoires !

Travaux scolaires
Travaux scolaires

Concarneau n’est pas loin, nous décidons de prendre le bus pour aller y faire un tour le temps d’un après-midi. Nous oublions combien le réseau de transport en commun en milieu rural est peu développé. Les navettes doivent être réservées au moins une heure à l’avance auprès de l’agence locale. Cette dernière nous donne les horaires et lieux des correspondances. L’arrêt de départ est introuvable mais heureusement la conductrice, qui a trouvé une zone couverte par le réseau GSM, nous appelle pour nous demander où nous sommes.. quelle modernité tout de même. Nous embarquons à bord d’un Traffic flambant neuf qui fait le trajet rien que pour nous jusqu’au prochain bourg. Puis une correspondance avec le bus d’agglomération nous amène au coeur de Concarneau.

La vieille ville très touristique vaut le détour. Alors que nous parcourons les ruelles de la ville un homme nous interpelle et nous demande « vous connaissez l’arriège ?! ». Face à notre incompréhension il ajoute « Oui parceque là bas c’est le paradis des Bab ! ». Lilian, qui comprend qu’il s’adresse à nous à cause de sa barbe qui ne laisse personne indfférent (on aime ou pas), lui répond : « C’est que nous sommes en voyage depuis 5 mois, nous ne sommes pas vraiment des Babacools… » Nous en rigolons encore

"Vous connaissez l'Ariège ?"
« Vous connaissez l’Ariège ? »

Cette barbe imposante nous a valut d’être pris en photo par des panaméens qui semblaient contents de voir Jésus en personne en face d’eux… Lilian n’est pas prêt de la couper mais en Irlande cela nous permettra peut être de passer incognito.

Nous finissons notre visite en grimpant sur les remparts qui font le tour de la ville et les filles s’amusent à identifier les drapeaux qui flottent au vent sur le port.

Le retour au camping se fait en bus scolaire avec des lycéens, nous avons la chance de faire des boucles dans tous les lotissements entre Concarneau et Névez et mettons 1h20 pour effectuer les 12 km qui séparent les deux villes.

Demain on part, c’est maintenant certain !

Lilian revient du magasin de bricolage avec une tige filtée qui dépasse de sa sacoche, des lames de scie à métaux et des boulons. Avec une vieille chambre à air il enroule la première lame et commence à s’attaquer à la tige filtée. Il ne faut pas attendre très longtemps avant que la lame ne casse… Il en a acheté 10 pour 1,5€, il ne faut pas trop en demander, le tout est de rester patient. Une vingtaine de minutes plus tard il vient à bout de son tronçon. Il complète la partie de la tige filtée qui sera à l’intérieure du moyeu par du scoubidou, collé et scotché, afin que les roulements à billes tournent bien et éviter qu’il y ait du jeu dans l’axe. Un boulon de chaque côté, un peu d’ajustements pour remettre la roue en place sur la carriole et le tour est joué !

Roue réparée !
Roue réparée !

Il s’avère que nous sommes à quelques kilomètres d’un spot de surf et que les conditions pourraient être au rendez-vous aujourd’hui. Ca tombe bien, cela nous donne la destination de notre tour de test de la réparation. Malgré la température, le vent, la pluie et une mer en chantier, Lilian attrape quelques vagues pour le plus grand plaisir de tous.

Réparation validée ! Nous attendrons tout de même le passage de TNT qui doit livrer une roue de remplacement. Ce qui est certain c’est que demain il pleut et nous nous mettrons en mouvement !

16 commentaires

      • et pourtant depuis 8 jours on n’a pas eu 1 goutte de pluie, contrairement aux crues catastrophiques ailleurs en France ! un comble (de bonheur) pour nous pauvres bretons toujours maltraités par la météo :-)
        Have a nice trip further up to Ireland , Scotland Norway…
        bonne continuation à toute la petite famille

      • et pourtant depuis 8 jours on n’a pas eu 1 goutte de pluie, contrairement aux crues catastrophiques ailleurs en France ! un comble (de bonheur) pour nous pauvres bretons toujours maltraités par la météo :-)
        Have a nice trip further up to Ireland , Scotland Norway…
        bonne route

        • 8 jours sans pluie? Nous avons quand même trouvé des orages et belles averses sur le Nord Finistère la semaine dernière. Rien comparé aux intempéries ailleurs en France en effet.
          Merci pour les encouragements.

      • J’espère que la Bretagne vous a plu sans pluie. Brest vous souhaite « un bon vent aidant » sur vos chemins d’aventure . kenavo.

        • Bonjour Irène,
          La Bretagne nous en a fait voir de toutes les couleurs : du plat, des paysages monotones, du relief, des champs d’artichaus, de choux, des plages, des falaises, de belles campagnes, des ports, du soleil, du vent, de la pluie, des orages, du brouillard… il nous manque la neige et on est bon :-)
          Merci Irène pour ce moment passé avec toi le temps d’un repas improvisé.
          Merci de nous avoir fait découvrir (entre autre) le far bouan et ce jus de pomme si magique.
          Merci pour tes bras grands ouverts qui ont réchauffé nos coeurs de voyageurs.
          Kenavo !

  • salut
    on s’est vu sur le bateau du Golfe du Morbihan !!!
    Dommage, j’étais à Plovan (milieu baie d’audierne) pendant la semaine de pentecôte. On aurait pu se recroiser et vous héberger. Je ne pensais pas que vous poussiez jusqu’au « bout du monde » (penn ar bed).
    A une prochaine sur les routes.
    Kenavo.
    PS : merci pour le petit mot sur votre blog … j’ai aussi pensé à vous sur ma dernière MAJ de mon blog :-)

  • je vous ai vus à Douarnenez tout à l’heure (fête du Port-Rhu) les filles ont du apprécier le manège original . Vous devez être à Locronan ce soir… pas terrip’ la météo (comme on dit ici avec l’accent finistérien).
    Bonne continuation à vs 4
    merci pour votre carte « de visite »qui me permet de vous suivre maintenant;

  • j’ai bien rigolé !
    tout est bien qui finit bien, le coup des babascool, pas mal !!!
    il faudrait que charlotte mette des fleurs dans ses lonnnngs cheveux!!!
    Continuez comme çà!
    Bises

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