D’après Nanci, il existe un moyen d’éviter une boucle de 10km pour aller en direction du Sud de la péninsule. Ce raccourci exige en revanche de traverser l’estuaire d’une rivière proche de chez elle. Il n’en faut pas plus pour exciter les aventuriers que nous sommes ! De plus, l’aperçu de la piste que nous avons eu la veille ne nous a guère ravi, cette option nous semble donc des plus pertinentes.

Pendant que Charlotte fini de plier de camp, je pars avec Dave en repérage, pour valider que la traversée est possible. En effet, notre hôte nous a prévenu, on ne peut passer qu’à marée basse, or aujourd’hui, la marée sera basse à 13h… Impossible d’attendre si tard pour partir et je piaffe d’impatience.

Une microadventure dans notre macroadventure

Nous partons donc avec Dave et arrivons rapidement à la piste sableuse indiquée par Nanci, qui nous amène sur la plage. Nous longeons le Pacifique sur quelques centaines de mètres et nous voilà au bord de l’estuaire. L’eau s’écoule tranquillement vers l’océan, seulement perturbé par quelques vagues à contre-courant. J’observe pour évaluer le passage le moins profond et entreprend la traversée. Rapidement j’ai de l’eau à la taille, puis au nombril. Il me faut environ 20m de traversée pour rejoindre l’autre rive. Le temps que nous revenions, l’eau aura probablement baissée. Piece of cake ! 

Dave me rejoint et nous observons la colline qu’il nous faudra franchir pour rejoindre la piste. A priori rien d’insurmontable, il faudra pousser certes, mais sur une très courte distance. C’est décidé, notre route sera celle-ci ! Il y a de fortes chances pour que la logistique associée à cette traversée ne nous fasse pas gagner de temps par rapport à l’itinéraire principal, mais nous sommes excités comme des enfants à l’idée d’ajouter cette microadventure à notre journée.

De retour chez Nanci et Marc, nous chargeons les vélos et nos hôtes embarquent les filles dans leur voiture pour qu’elles profitent de quelques instants de climatisation.

Arrivés sur la piste de sable qui mène à la plage, cette fois-ci avec nos vélos chargés de leurs 30kg de bagages, l’effort n’a plus rien à voir avec la ballade de santé effectuée l’heure précédente. Je n’arrive même pas à faire avancer mon vélo auquel est accroché la carriole. J’ai l’impression de tirer une ancre. Charlotte vient à mon secours et, péniblement, nous amenons mon attelage sur le sable humide pour que je puisse le pousser seul… dire que les filles n’étaient même pas à bord !

Marc, Nanci et les filles nous rejoignent au bord de l’estuaire. Nanci surveille les filles qui se régalent à jouer dans l’eau avec deux petits jouets qu’elle leur a offert. Charlotte, Dave, Marc et moi entamons les traversées à pieds pour faire passer sacoches, vélos et carriole.

Nous rechargeons les vélos, prenons une photo de groupe et remercions une dernière fois Nanci et Marc pour leur infinie gentillesse, avant que ceux-ci ne regagnent l’autre rive. Cette parenthèse dans notre voyage nous a fait le plus grand bien. Nanci, qui a bien mesuré l’ampleur de notre exercice à vélo, a semé en nous des réflexions à mener autour de notre expédition. Nous l’emportons donc d’une certaine manière avec nous.

1000 mercis Nanci et Marc !
1000 mercis Nanci et Marc !

Il faut maintenant retrouver la piste. D’après nos études de cartes et photos satellites (mais comment les voyageurs à vélos faisaient-ils avant internet ?!), une première piste se situe à moins de 500m de notre position et doit nous conduire vers la route qui longe la côte.

NB : A chaque fois que nous utiliserons le mot « route » dans cet article, n’imaginez surtout pas celle qui passe devant chez vous.

A nouveau je pars avec Dave en reconnaissance. Nous gravissons rapidement la colline par sa ligne de moindre pente et buttons sur une clôture de barbelés du type « guantanamo » qui nous avait échappé lors de notre observation depuis la plage. Celle-ci est en effet cachée par la végétation environnante. Compte tenu de la pente il nous parait très difficile d’amener jusqu’ici tout le matériel et de le faire passer de l’autre côté. Nous longeons donc cette barrière et environ 300m plus loin nous trouvons un passage pour piétons… d’environ 40cm de large ! C’est ici que nous passerons tandis que les vélos devront être passés par dessus. Deuxième épreuve de la journée.

De retour sur la plage nous informons Charlotte de notre déconvenue et nous mettons rapidement en route vers l’ouverture dans la clôture, en longeant la plage. A nouveau, nous consommons notre précieuse énergie à pousser notre lourd convoi dans le sable, puis au travers d’un parterre végétal mi-brulé par le soleil.

Déchargement des vélos, portage par dessus la barrière, rechargement des vélos.

Nous remontons enfin sur les vélos et nous engageons sur un chemin, que l’herbe cramée a depuis longtemps entrepris de faire disparaitre. Charlotte, qui tracte les filles, redouble d’efforts pour avancer sur ce terrain qui ferait peur à plus d’un cycliste. Nous avançons lentement à la recherche de la piste, plus souvent guidés par notre instinct que par nos souvenirs des vues satellite observées le matin. Nos efforts paient et nous voyons enfin la route au bout de ce qui doit être un champ puisqu’à nouveau une clôture bloque notre chemin. C’en est trop ! Deux heures que nous avançons comme des bagnards, boulets aux deux pieds. Non loin de là, une maison borde la route. Par chance un homme en sort et nous lui demandons si nous pouvons passer par son jardin. Enfin nous arrivons sur la piste.

En piste !

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Seule photo que nous aurons le courage de prendre sur cette infame piste.

 

Il est midi. En deux heures nous avons franchi une rivière, une clôture de barbelés, poussé sur la plage, roulé sur des chemins qui n’en sont plus. Nous n’avons même pas parcouru deux kilomètres et la fatigue se fait sentir. Il nous reste 35km à parcourir. C’est probablement encore jouable puisque nous sommes sur la route principale. Bien que celle-ci se résume à une piste il nous semble tout à fait possible d’arriver avant la nuit. Nous nous mettons en route.

Il fait chaud.

Mon compteur indique 7km/h. A peine avons nous commencé à rouler que la piste est traversée dans toute sa longueur par des vaguelettes de boue séchée, rendues dures comme de la pierre. Autant rouler sur de la tôle ondulée directement sur les jantes. L’aluminium de nos vélos transmet la moindre vibration à nos poignets et à nos derrières déjà meurtris par les longues étapes sans repos des jours précédents. Debout sur les pédales, nous ralentissons jusqu’à la limite de ce que nous permet notre équilibre et zigzagons au milieu des cailloux.

Il fait trop chaud.

Nous sommes en plein soleil, au plus chaud de la journée. Les rares voitures qui nous doublent trainent derrière elles des nuages de poussière qui nous colle immédiatement à la peau et nous remplie les narines. Devant nous se présente une première côte. En temps normal, sur le bitume, nous l’aurions avalé d’une traite. Charlotte démarre l’ascension et rapidement la piste devient sableuse, jonchée de roches mobiles de toutes tailles. Pied à terre. Je pose mon vélo et la rejoins pour pousser la carriole. Elle repart, je vais chercher mon vélo et la rejoins.

Après une courte descente, à nouveau une côte, plus raide encore. Nouvel essai, pied à terre. Pendant près de 3h ce petit manège se poursuit avec des pentes qui atteignent parfois les 15%. Charlotte viendra a bout d’un seul de ces murs sur son vélo, tellement l’exercice est difficile. Dave nous attend régulièrement et pousse lui aussi.

Nous atteignons Marbella. Un lieu dit qu’un minuscule point indique sur la carte. Là un homme qui nous a vu arriver nous conseille de nous rendre à la page située non loin d’ici. L’unique restaurant qu’on y trouve est à priori très bien et la plage magnifique.

Nous faisons un point d’équipe. Il est presque 15h, nous avons parcourus 12km en 5 heures et nous avons faim ! Nous décidons d’aller manger sur la plage et d’aviser, une fois l’estomac plein, de ce qu’il conviendra de faire pour le reste de la journée.

Après avoir englouti un burger bien trop cher, nous décidons de rester ici pour la nuit. Nous nous sommes épuisés en prenant le « raccourci »  et nous devons nous reposer pour affronter la piste le lendemain.

Dans les alentours, un camping et un hôtel. Les deux sont hors de prix et nous décidons que nous bivouaquerons sur la plage. Elle est déserte et le restaurant où nous avons mangé nous a proposé d’utiliser leur douche.

Dernière épreuve de la journée, nous poussons nos vélos lourds comme des motos dans le sable pour nous éloigner de la route et se cacher un minimum. Nous courrons nous jeter dans les vagues du Pacifique pour se rafraichir après ce qui a été la journée la plus éprouvante du voyage depuis notre départ.

Liv et Tess se construisent une cabane en bois flotté alors que le soleil descend lentement sur l’horizon. Nous montons la tente et ramassons le bois qui jonche la plage pour préparer le feu qui nous accompagnera pour la soirée, plus pour l’ambiance que pour la chaleur !

Il ne faut pas grand chose pour s'amuser !
Il ne faut pas grand chose pour s’amuser !

Le coucher soleil est incroyable. Aussi beau que la journée a été éprouvante.

Dernier bain de la journée.
Dernier bain de la journée.

Dave s’absente un moment, le temps d’aller chercher de la bière fraiche au restaurant. Nous préparons une soupe de pâtes que nous mangeons tous ensemble autour du feu, sous un ciel étoilé qu’aucune pollution lumineuse ne vient gâcher. Chacun se laisse aller à ses pensées, bercées par le bruit des vagues.

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Le bivouac

La nuit à fait sortir des dizaines de crabes des sables. La surprise passée, les filles s’amusent à regarder ces « Sébastien » (Le crabe de « La petite sirène ») qui vont et viennent autour de nous.

La nuit est aussi bonne que le réveil. Levés avec le soleil, nous sommes rapidement prêt à partir. Les filles sont tristes de quitter cette belle plage, et nous leur promettons qu’il y en aura d’autres.

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